Apprendre les mathématiques mais autrement
Si un changement radical s'impose d'urgence, et que la priorité doit être mise sur ce qui pourra rétablir l'égalité républicaine dans notre système scolaire et lutter contre la ghettoïsation, il ne faudrait pas perdre de vue que c'est en sciences et en mathématiques que le problème est le plus aigu. Oui, il faut que l'égalité des chances redevienne une réalité, et c'est dans les domaines où le problème est le plus grave qu'il faut faire le plus d'efforts.
Mais il faut aussi modifier profondément les approches pédagogiques (ce qui suppose d'agir sur la formation des professeurs), diminuer la part du magistral, mettre les élèves en situation de questionnement par rapport aux savoirs transmis. On sait bien que les mathématiques souffrent d'un enseignement trop tourné vers l'acquisition d'un catalogue de techniques dont le sens échappe le plus souvent aux élèves.
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Il faut que le lien avec les autres disciplines devienne plus apparent, que les connaissances transmises soient mises en perspective, que les élèves soient en situation de relier ce qui est enseigné dans le cadre scolaire et les activités économiques et sociales.
INITIATIVES LES PLUS INTÉRESSANTES
Parmi les initiatives les plus intéressantes figurent celles qui s'inscrivent dans le cadre périscolaire, entendu non comme l'industrie des petits cours payants et du soutien scolaire, mais un ensemble très diversifié d'activités qui complètent et revitalisent la pratique des mathématiques et améliorent la perception qu'on en a dans le grand public :
– réalisation d'expositions fixes et itinérantes, de documents et brochures sur des thèmes mathématiques ;
– conférences dans les établissements faites par des chercheurs en mathématique et des ingénieurs ;
– clubs et ateliers mathématiques dans les établissements, permettant de pratiquer les mathématiques de manière différente, dans des logiques collectives, par la réalisation de projets et par une initiation à la recherche pour les plus grands et des pratiques liant jeux et mathématiques pour les plus jeunes ;
– participation à des compétitions mathématiques individuelles et par équipes ;
– tutorats et stages, notamment à l'intention des jeunes issus des milieux défavorisés sur le plan géographique ou social ;
– actions ciblées à l'intention des filles pour les aider à surmonter la barrière des stéréotypes et des préjugés…
De nombreuses expériences sont menées un peu partout, et avec succès, dans les villes, les banlieues et les zones rurales ; elles s'adressent aussi bien aux jeunes très motivés qu'à ceux qui le sont moins et que seules des pédagogies différentes peuvent remettre sur la bonne voie.
Elles donnent une chance de réussite à celles et à ceux que leur origine sociale, leur provenance géographique ou leur sexe pouvaient empêcher de réaliser leur potentiel. Elles montrent qu'il n'y a ni fatalité du déterminisme social ni fatalité de l'échec.
PROMOUVOIR LE GOÛT DE CETTE DISCIPLINE
C'est dans le cadre du consortium Cap'Maths que les mathématiciens se sont regroupés en 2011 pour promouvoir le goût de cette discipline et la pratique de telles activités et leur assurer une plus grande visibilité. La priorité étant de les développer auprès des publics qui ont tendance à s'en éloigner.
Cap'Maths, qui rassemble l'ensemble des acteurs des mathématiques en France, et est porté par l'association Animath, a été sélectionné au titre des « Investissements d'avenir » dans le cadre de l'appel « Culture scientifique et technique et égalité des chances ». Les fonds ainsi obtenus permettent de financer des dizaines d'actions un peu partout en France.
Les constats faits aujourd'hui à propos du système éducatif et de la situation des mathématiques montrent à quel point cette démarche était pertinente et correspondait à un besoin urgent. Sans être la panacée, ces activités ouvrent des portes ; elles doivent pouvoir se développer un peu partout, selon des modalités adaptées, dans nos écoles, collèges et lycées.